De la Paresse intrinsèque du Nègre et autres parfums nauséabonds...

Publié le par ricardoglenn

"Pour une fois, je me suis mis à travailler comme un nègre. Je ne sais pas si les nègres ont toujours tellement travaillé, mais enfin…"  

Jean Paul Guerlain au JT de 13h sur France 2, le 15 octobre 2010

 

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Sans vouloir faire mon Audrey Pulvar, ma Mère aussi portait un parfum de Guerlain. Jardins de Bagatelle. Créé par le Jean Paul Guerlain en question, générater de polémique... Ce n'est pas son parfum le plus emblématique, celui qui me fait l'effet madeleine quand je le sens, mais c'est un des parfums préférés de ma Mère. Ma première réaction en lisant le réquisitoire de mlle. Pulvar a été: "je n'achèterai plus jamais ce parfum à ma Mère, malgré le fait qu'elle l'adore!" En allant chercher sur YouTube la vidéo/ preuve à conviction numéro un de ce procès, j'ai eu des hauts le coeur en entendant ce vieillard aux idées d'un autre âge s'exprimer ainsi à la télé publique, à une heure de grande écoute. 

 

Plus que ses propos,  c'est le silence de qui de droit qui m'a le plus choqué. Quid de la classe politique, toujours prompte à défendre les valeurs de la République? Les Nègres mériteraient-ils moins d'égards que d'autres "commnautés" qui composent le tissu hétéroclite de la population française? Qu'un vieux débris héritier d'un empire qui a fondé sa puissance sur l'exploitation et le colonialisme s'exprime de cette façon, c'est choquant, certes, mais, ne soyons pas naifs, c'est un peu ce qui arrive à tous les gens de son milieu, de son âge. Il a grandi en prononçant le mot "Nègre" librement, et est resté imperméable aux profonds bouleversements qu'a connu la société française depuis la fin du "temps béni des colonies". Comme lui, il y en a une tripotée, et le nier ce serait donner continuité à la politique de l'autruche en vigueur en France depuis si longtemps qu'il n'est même plus la peine de relever...  JIPÉ est juste sorti du placard au JT de 13h, mais je suis certain que pour ceux qui le connaissent, ces propos n'ont rien de surprenant...

Assez vite, l'opinion publique a fait savoir son indignation, et de boycott en manifestation, l'entreprise Guerlain s'est pris un vent de mauvaise pub dont elle se serait volontiers passée... Passé le mini incident médiatique, l'indignation juste et justifiée, collective et personnelle, je me suis demandé: en tant que citoyen, en tant que Nègre, en tant qu'être pensant, que dois je penser et tirer de toute cette histoire?

 

Plutôt que de me lancer dans une grande tirade toute théorique sur le manque de respect des valeurs Républicaines, sur l'inégalité de traitement de l'info selon qu'elle concerne les uns ou les autres, plutôt que de communatariser le débat (je pense q ces propos sont condamnables par quiconque tient aux valeurs de Liberté, Égalité et Fraternité professées par la France dans sa devise Nationale, et non pas par les seuls Nègres concernés par le dérapage d'un gâteux), je vais essayer de prendre une approche pragmatique.

 

Voici le communiqué officiel paru dans le site de la marque Guerlain:


Vous êtes nombreux à avoir été choqués par les propos tenus par Jean-Paul Guerlain sur le plateau du Journal Télévisé de France 2, le 15 octobre dernier. Nous le comprenons parfaitement : c’est l’absence de réaction qui aurait été choquante.

La société Guerlain a communiqué sa position officielle aux médias et sur sa Page Facebook:
"La société Guerlain a pris connaissance avec consternation des propos inadmissibles tenus par Jean-Paul Guerlain et les condamne avec énergie. Jean-Paul Guerlain, âgé de 73 ans, n'est plus actionnaire de Guerlain depuis 1996. Il n'en est plus le salarié depuis 2002. Ses propos sont à l’opposé de la culture, des valeurs et de l’éthique pratiquées par l'entreprise qui promeut la diversité des talents de toutes origines dans le monde entier."

 

Nègre. Negro. Noir. Africain. Black. Peu m'importe c que je suis à vos yeux, je suis tout ça et bien plus. Je n'ai jamais consommé personnellement le moindre produit Guerlain. Mon Boycott n'aurait donc aucune incidence réelle sur la société. Ceci dit, ma Mère aime un parfum en particulier de la maison Guerlain. Ma Mère est, tout comme moi, Noire. Négresse. Et aussi loin que je me souvienne, je l'ai toujours vue travailler. Toujours. Elle va fêter en Février 2011 ses 35 ans de maison en tant que haute fonctionnaire Angolaise. Elle a gravi les échelons un par un, s'est forgé une carrière digne et respectable, dans un contexte pas toujours favorable à une femme, dans une société machiste où la révolution de 68 n'a pas eu lieu... Ma Mère, comme beaucoup de mères qui ont élevé leurs enfants seules, a endossé plusieurs rôles, plusieurs casquettes. Une vraie mère "à l'ancienne", elle nous a transmis un sens des valeurs, et surtout un exemple sans pareil lorsqu'il s'agit d'éthique, de respect, d'abnégation et de TRAVAIL. Oui, ma mère travaille depuis bien longtemps, sur plusieurs fronts. Sans répit, sans fléchir. S'assurant que mon frère, ma soeur et moi ayons le nécessaire pour devenir à notre tour des citoyens droits et INTÈGRES. Rien de ce qu'elle a acquis jusqu'ici dans sa vie ne lui a été donné, encore moins facile, mais elle a travaillé, elle n'a que ce mot à la bouche, elle ne fait que ça, elle vit en grande partie pour ça.

 

Cette Négresse n'a pas donné le moindre signe de paresse depuis 40 ans, elle a donc mérité de se payer ses petits plaisirs, aussi anodins soient-ils. Comme un bon parfum. Et devrait-elle en être privée parce qu'un vieux réac' (qui a créé ledit parfum, soit...) a mis en lumière son mépris envers les Nègres sur le sang et la sueur de qui il a construit son empire? NON! Mille fois non! Cette négresse a gagné par son travail le droit d'avoir ce qu'il y a de meilleur, et si le hasard veut que ce soit un parfum créé par un raciste, alors soit! Il devra se faire une raison, et se dire qu'il y a désormais, contrairement à l'époque dont il semble si nostalgique, des Négresses qui à force de travail, ont les moyens de se payer ses précieuses créations, alors que je suis sûr qu'il ne les leur destinait pas le moins du monde, en les créant. Je ne peux imaginer de meilleure réponse à cet espèce d'incontinent verbal nauséabond que de sentir au passage d'une Négresse les éfluves de ce qu'il a lui même créé, en pensant sûrement en priorité (voire exclusivement) à ses "semblables" Blanches comme clientes. Le peu de temps qu'il te reste encore à vivre sur terre, vieux débris d'un autre temps, il faut que tu prennes conscience, de gré ou de force, que le monde n'est pas tel que tu le vois dans ta publicité Banania, dans ton album de Tintin au Congo: et tant mieux que tu considères que tu as travaillé "comme un Nègre" (même si nous savons tous à quel point tu es loin de la vérité...), pour que tes essences viennent désormais orner les cous de celles que tu dois encore avoir du mal à considérer comme des êtres humains. 

 

Je citerais bien Césaire en guise d'au revoir, mais c'est du déjà vu, alors je m'en tiendrais à Maya Angelou, et son magnifique poème, "Still I Rise":

 

You may write me down in history
With your bitter, twisted lies,
You may trod me in the very dirt
But still, like dust, I'll rise.

Does my sassiness upset you?
Why are you beset with gloom?
'Cause I walk like I've got oil wells
Pumping in my living room.

Just like moons and like suns,
With the certainty of tides,
Just like hopes springing high,
Still I'll rise.

Did you want to see me broken?
Bowed head and lowered eyes?
Shoulders falling down like teardrops.
Weakened by my soulful cries.

Does my haughtiness offend you?
Don't you take it awful hard
'Cause I laugh like I've got gold mines
Diggin' in my own back yard.

You may shoot me with your words,
You may cut me with your eyes,
You may kill me with your hatefulness,
But still, like air, I'll rise.

Does my sexiness upset you?
Does it come as a surprise
That I dance like I've got diamonds
At the meeting of my thighs?

Out of the huts of history's shame
I rise
Up from a past that's rooted in pain
I rise
I'm a black ocean, leaping and wide,
Welling and swelling I bear in the tide.
Leaving behind nights of terror and fear
I rise
Into a daybreak that's wondrously clear
I rise
Bringing the gifts that my ancestors gave,
I am the dream and the hope of the slave.
I rise
I rise
I rise. 

Publié dans société

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C
Blog(fermaton.over-blog.com),No-1. - THÉORÈME DU BOURDON. - La Paresse du Hasard ?
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